lundi 8 juillet 2013

Trois mois ... que tu es allé de l'Autre Côté, mon Papa


Aujourd'hui 8 juillet, cela fait 3 mois.
D'abord, mon papa chéri, je vais éditer le texte que j'avais lu à tes funérailles (mon frère et ma sœur ont fait de même, mais ces textes relèvent de leur intimité) ... moi je veux dire comment je t'aimais à ma manière.

Mon Père ce héros, mon Papounet, mon Papa chéri,

Ces derniers mois, en plus de nos nombreux skypes, je t’écrivais des mails pour te raconter des événements, des difficultés  et des joies de mon quotidien – pas toujours facile – mais aussi mes réflexions, mes questions, mes angoisses, sur mon avenir, sur la Vie. Tu me lisais, parfois tu me répondais laconiquement, et parfois me skypait pour en discuter longuement, avec ce leitmotiv : reviens à ici et maintenant.

Maintenant c’est l’heure de mon dernier mail pour toi.

Tu avais avec chacun de tes enfants une relation privilégiée.

Quand j’étais enfant, tu m’avais expliqué que l’Amour d’un parent pour ses enfants ne se partageait pas mais était comme exponentiel.

 

Tu nous aimais autant chacun de nous trois, Jean Yves, Christianne et moi : Néanmoins tu m’avais expliqué qu’avec l’ainé des enfants, c’était un peu différent car c’était la découverte  et l’entière disponibilité de la paternité.

Je suis fière papa d’être ta fille ainée, je suis heureuse d’avoir reçu en héritage des morceaux de toi : ho bien sûr quelques gènes déficients qui nous ont fait souffrir toi et moi, mais surtout des valeurs et des moments d’intense bonheur.

 

Voilà quelques instantanés de notre relation et des souvenirs  que je vais partager avec cette assemblée venue te rendre hommage :

 

-       Je me souviens comme petite au Congo je voulais toujours t’accompagner partout où tu allais. Un jour vers 4 ans, j’ai franchi rivière et forêt avec mon légendaire sens de l’orientation, bravant l’interdiction parentale, pour te rejoindre dans ta classe, quelle fameuse aventure et quelle fierté d’y être parvenue, je t’avais retrouvé ! Et j’ai pu effacer le tableau pendant  ton cours malgré ta surprise et ton air pas très ravi au départ. ;)

-       Je me rappelle de la chasse aux oiseaux avec les arcs, dans la forêt … quelle excitation !

-       Et le jour où tu avais lancé ton pied dans la vitre de la maison en feu des amis voisins, pour essayer de sauver quelques affaires et que tu t’es retrouvé par terre, le pied ouvert au tendon d’Achille, plein de sang partout … la 1ère fois que je voyais mon papa blessé (quelle engueulade nous avions reçu par la suite toi et moi de la part de maman )

-       Et puis encore, mon 1er enterrement  avec Poum le chat, tu m’avais emmenée au bord de la rivière pour l’enterrer et tu m’avais expliqué la mort, la vie.

-       Je nous revois encore, beaucoup plus tard, moi adolescente, discuter des heures le soir dans la cuisine de la maison à Bxl, devant nos bols de glace, partageant nos réflexions sur la vie et le monde

-       Et encore, la table de la salle à manger où nous nous retrouvions tous après le souper, à étudier : toi tu bossais pour ton diplôme d’expert-comptable à 40 ans. Et c’est là que tu as rencontré Philippe,  et par là même Michèle, et nos familles s’en trouvent définitivement liées

-       Quel souvenir marquant le jour où lors de mon premier chagrin d’amour tu m’avais dit : « c’est à toi de vivre tes propres expériences, je ne peux pas te soulager de la douleur mais sache que je serai toujours à tes côtés pour ramasser les morceaux et t’aider à te relever »

-       Deux décennies plus tard  je me retrouve malade , cancer du sein et tuberculose hépatique : une étrange absence et une distance – tu me dis que c’est une affaire de femmes mais c’est surtout un questionnement pour toi de par la filiation paternelle certaine,  ainsi qu’ une certaine défense, et culpabilité même … par la suite te rendant compte que ce n’était malheureusement pas un déboire passager (et après nos discussions lors desquelles je t’avais dit avoir besoin de toi aussi pour traverser ces épreuves), tu m’as aidée à ramasser les morceaux, à me soigner et à me relever (même si j’en boîte toujours). En effet tu as géré et été présent tant psychiquement  que spirituellement, émotionnellement  et matériellement (et c’est grâce à toi et maman que je peux me soigner correctement et vivre décemment).

-       Et l’un des derniers merveilleux souvenirs : ta présence inattendue lors de mon anniversaire en juin dernier avec ta sortie surprise de l’hôpital,  pour être présent et faire la fête  ce jour-là à nos côtés.

 

Le fil rouge de tous ces  moments de vie ensemble, c’est l’amour réciproque que nous nous portions, et le dialogue ouvert – pas à chaque fois aisé et même parfois avec des étincelles mais toujours si authentique, respectueux et sincère.

 

Dimanche soir, en me mettant au lit, je me suis dit – fruit d’un long travail et d’une réflexion de fond – qu’il était vraiment temps pour la petite fille amoureuse de son père qu’elle mettait sur un piédestal, de couper le cordon.

Et voilà que ce lundi matin tu t’en es allé de ce monde tangible pour rejoindre les anges et la Vie de l’autre côté.

Je ne t’écrirai sans doute plus de mail mais compte sur moi pour toujours te parler, je sais que tu m’entendras. Et que tu me répondras d’une manière ou d’une autre, avec ton humour si personnel.

 

Je porte une part de toi en moi et j’en suis heureuse.

Mon père, ce Héros.                                                                                  
Marie




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire