dimanche 15 décembre 2013

Ma séance de biothérapie en chimio de ce vendredi

Bonjour tous,

A mon arrivée, j'ai du attendre un moment et j'ai discuté avec un autre patient lui même ayant eu un parcours peu banal : j'avoue que je ne sais plus si c'est spondylarthrite ou Crohn, ma mémoire n'étant plus du tout ce qu'elle était (mais alors plus du tout, et ça c'est encore un deuil moi qui était si fière de pouvoir tout retenir, les noms, les visages, les détails, l'important bien sûr, alors que je l'entretiens quand même :( c'est comme si la sélection de ce qui est retenu se fait selon d'autres critères, avec parfois des décrochages ... maladies  plus médicaments et autres traitements (et bon le vieillissement naturel)  et pourtant j'écris, j'arrive à lire maintenant, parfois pendant 1h d'affiler les jours de bonne forme ! Avant je pouvais lire 3 livres sur le w-end ... même si avant j'étais plus jeune. Mais l'important c'est maintenant et ce que je suis devenue actuellement et surtout  l'accepter pour bien le vivre.

Ce monsieur était donc en cure d'anti tnf (= biothérapie). Très bronzé mais un bronzage comme brûlé et des lunettes de soleil. Accompagné par sa femme. Un couple soudé, cela se voit.

Je suis comme mon père, j'aime rencontrer, partager, découvrir, pas du tout par curiosité malsaine mais parce que l'autre, les autres vivent des vies différentes et chacun est un être particulier et derrière chaque personne se cachent des vies, des joies, des drames, le banal comme l'exceptionnel : je suis un être sociable et communicatif et pour moi la vie a de l'intérêt dans la rencontre et l'échange, naturellement, sincèrement, sans jugement moral, avec le plus d'empathie possible. Quand je peux ... c'est clair que les mois de repli, les pics de maladies, les périodes, qui sont malheureusement les plus fréquentes pour le moment, où je suis mal, je n'arrive pas à aller vers l'autre.
Je n'ai que l'énergie de rester couchée ou assise. Point. C'est là qu'internet m'est d'un grand soutien pour rester en "connexion" avec la vie de l'extérieur et avec les gens.

Si pendant plus de 15  ans j'ai travaillé dans le domaine psycho-social, dans l'aide aux victimes de violence, auprès de policiers désarmés à l'époque (il y a 20ans, les commissaires achetaient sur leur salaire propre les premiers pc pour élaborer les procès verbaux envoyés au parquet, sinon c'était l'antique machine à taper avec tippex, c'était l'antiquité ! Vous n'imaginez pas ! Je pourrais aussi faire un livre sur mon travail tant au contact des victimes que des policiers du terrain et des encadrants !) ça n'était donc pas pour rien. J'ai beaucoup donner de moi, parfois sans me protéger assez.

Ecouter, reconnaître, intervenir, aider, dialoguer, mettre en place une concertation, expliquer pour mieux comprendre et accepter les réalités et les contingences légales ... par ex lors du décès, en particulier lors d'un meurtre d'une personne de confession musulmane, une autopsie est incontournable et fait partie de la procédure judiciaire, or la profanation du corps du mort est intolérable pour les musulmans. En expliquant de part et d'autres avec minutie et sincérité et en mettant en place des procédures adaptées - plus de rapidité du côté du médecin légiste qui est complètement dépassé par la masse de travail, plus de rapidité aussi pour les documents administratifs délivrés pour l'ensevelissement surtout quand le corps part à l'étranger et de l'autre côté l'avantage de dire oui rapidement pour "récupérer" la dépouille plus vite, en expliquant le pourquoi de cette disposition légale en prenant le temps d'aller en parler dans la famille ... une concertation et un chaînon entre les 2 parties permet que ces situations se passent de manière moins agressives des 2 côtés. C'est pareil quand il faut annoncer à une maman que le corps de son enfant va être autopsié, il y a tout un travail d'accompagnement psychologique et pratique, très pratique, qui peut soulager la famille. Et ça ce n'était qu'un aspect du travail. Qui est loin d'être diminué compte tenu du fossé de plus en plus grand qui se creuse entre le justiciable et les autorités judiciaires : la vétusté tant matérielle qu'intellectuelle - je veux dire par là que le législateur est souvent en retard de 50 ans sur la réalité de la vie de la société (même si la génération actuelle tend à diminuer ce décalage) et donc les structures de justice elles-mêmes fonctionnent parfois avec des idées "à l'ancienne" qu'il faut réformer ce qui est ardu pour ceux qui le tentent de l'intérieur - et le manque d'argent sont des éléments lourds qui pèsent. Par contre que chacun introduise une parcelle d'humanité dans ce qu'il fait ne coûte rien. Et ça c'est un let-motiv que je laissais derrière moi à chaque fois.

Donc j'en reviens à ce monsieur qui, si on ne connaît pas son parcours,  semble de l'extérieur un peu particulier - bronzé avec des lunettes de soleil dans un hôpital.
Suite à un médicament prescrit, il a fait une réaction allergique et s'est retrouvé le corps "brûlé" des yeux aux pieds. Cortisone en sus de traitements divers, il continue de travailler tant bien que mal (alors que les médecins lui disent qu'il endommage sérieusement son capital vie). Sa famille - sa femme et ses enfants sont le moteur de sa vie.

Et donc ce monsieur me dit avec humour "ça fait du bien d'entendre qu'il a pire que soi" après m'avoir entendue résumer mon propre parcours.

Entre patients, il n'y a pas de fausse pudeur.
Et je suis bien contente si je lui ai fait du bien !
:)

Après un vendredi après midi de perfusion (5ème charge ou cure), je constate que soit je dors sans discontinuité pendant quelques jours soit c'est comme quand on reçoit de la cortisone à haute dose : vous êtes réveillé, avec l'impression d'avoir de l'énergie mais c'est une fausse force qui masque une immense fatigue qui ne va pas tarder à me terrasser.

Après avoir écrit ce post en une fois ... c'est bon, je retourne dormir !

Bon je sais que le 20 j'ai une réunion importante chez moi avec un comité envoyé par mon employeur ... leur objectif est de me mettre à le pension anticipée ... ce qui signifierait que ce ne serait plus survivre physiquement mais aussi essayer de survivre financièrement : en fait je n'arriverais pas à y survivre. Seule.  Et cela me "perturbe" ...

Et cette nouvelle épreuve dans ma vie, maintenant en plus, quel sens de rester en vie si c'est pour plonger dans la détresse sociale et financière ???
Je ne comprends pas.

Je vais essayer de faire confiance à la Vie ...

Bon w-end à chacun,
Marie Jo

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