mardi 22 avril 2014

Yves est parti de l'Autre Côté

J'attends que la peinture sèche ...

Je peins ... une toile ... pour Yves.

Yves avait les yeux noisettes.

Yves aimait l'eau.

J'ai demandé à Nathalie, sa cousine, mon amie chérie, lors de son minitrip en péniche inattendu de cueillir une fleur mauve et une fleur jaune et des les lancer dans l'eau, de ma part. Pour Yves.

Yves a disparu, puis on a retrouvé sa voiture - à 2 rues de chez moi !!!  interpellant - ensuite son corps dans un bois à Beersel.

J'étais en Suisse dans ma famille quand on l'a retrouvé, le mardi 8 avril à 18h.
Je priais devant mon autel et je demandais à mon ange gardien  - et à mon père - de retrouver au plus vite Yves (nous nous doutions qu'il serait mort) et aussi que la soirée d'hommage anniversaire dédié à mon père se passe le mieux possible.
C'est son ami, celui avec lequel il allait reconstruire le monde dans ce restaurant là où nous allions précisément qui organisait cette réunion entre proches.
Mon père est mort le 8 avril 2013 à 72 ans, d'une crise cardiaque, à la maison.

Il y a 3 jours cela faisait aussi effet fantôme pour d'autres événements personnels difficiles à vivre.

Je me suis promenée de deuil en deuil ...

Je viens de faire la paix avec la mort de mon père.

Pas avec le reste.


Je me rends compte que je fais deux tableaux à la fois ... un pour Anne et un pour Nath sans doute ...
Yves était poisson.


Yves je ne l'ai vu qu'une petite dizaine de fois ... Mais Yves je l'ai rencontré.
Yves m'a conduite à Erasme, il faisait partie de ma communauté de chauffeurs pour aller et venir dans cet hôpital, ma seconde résidence temporaire !
Ce moment dans sa voiture je ne l'oublierai jamais ... nous étions tous les deux" mals" et stressés ... je lui ai dit que j'avais fort mal et que s'il pouvait conduire moins nerveusement cela me serait vraiment meilleur et je lui ai expliqué l'examen que j'allais subir. D'un coup j'ai senti sa nervosité s'envoler ...
Lui même avait du fréquenter peu auparavant un hôpital pour une thyroïdectomie pour un cancer ...
Et nous avions parlé de la Vie et de la Mort. Et de l'importance de vivre et savourer le moment présent.


Nous étions comme deux âmes qui se reconnaissent, et nous nous sommes dit aurevoir avec grande tendresse et fraternité.


Quelques semaines avant son décès, je l'avais rencontré de manière inattendue chez Filigrane.
J'entends mon prénom, je me retourne, dans l'allée d'entrée si étroite et c'était lui : ses yeux perçants et pleins de sympathie, son sourire qui éclairait son visage comme les rayons du soleil qui rentrent dans une pièce qu'on aime.
Je n'étais pas en grande forme, un peu comme d'habitude (!) et il m'a entouré les épaules dans un geste rassurant en me disant, tu devrais aller voir le Dr "j'ai oublié son nom" nutritionniste (en dehors de BXL) il pourrait t'aider. Il voulait lui même m'aider avec tant de vraie gentillesse et d'affection ...
Déjà à Soumoy à la bergerie qu'il partageait en villégiature avec sa cousine, il m'en avait parlé. De ça et des peurs (cancer = épée de Damoclès souvent, prise de conscience de l'importance de respecter son corps et de prendre soin de soi, et la dualité avec les contraintes de la vie professionnelles et sociales, etc)  et des attitudes qu'il pensait meilleures à suivre pour combattre ces (ses) peurs.
Et puis tout à coup lui revient en tête la raison pour laquelle il était là, dans cette librairie,  et affairé d'un seul mouvement il me dit "bon là je suis pressé, je te laisse je vais chercher un livre pour mon neveu". On s'embrasse avec affection.

C'est la dernière fois que je l'ai vu. Et touché.

Mais je garde de lui son regard noisette perçant et son sourire illuminant son visage.

Demain c'est son enterrement.






Yves, à jamais dans mon coeur.
MJo







mardi 15 avril 2014

Trop dur pour le moment ... tellement épuisée ...

Bonjour,

J'ai décidé de vous mettre le cri du coeur d'une copine - ce cri est valable pour quelqu'un de malade du cancer comme d'une autre maladie grave (au singulier et à fortiori au pluriel).
Elle s'appelle Marie Mouah, je l'ai rencontrée via Facebook (qui n'a pas que de mauvais côtés).
Les personnes qui vivent une même expérience forte et traumatisante encore plus ont une connection particulière due au partage de cette expérience même si chacun la vit à travers le prisme de sa propre vie, il n'en reste pas moins que des éléments communs nous rapprochent.

"Quand j'ai appris que j'avais un cancer j'ai été terrassée par la peur ! 
Quand on m'a annoncé que 4 jours après je me faisais enlever cette saloperie de tumeur, j'ai flippé parce que je suis comme tout le monde, j'aime pas les hôpitaux, les piqûres,les opérations !
Quand on m'a dit que je ferais seulement de la radiothérapie, j'ai été soulagée et je me suis dit que j'avais de la chance...
Quand finalement on m'a annoncé j'allais faire de la chimio (le 23/12/2013), ma première pensée a été " merde, je vais perdre mes cheveux, mes sourcils, je vais être moche etc..."
Je pensais que c'était ce qui pouvait m'arriver de pire ^^
Il m'est arrivé de nombreuses fois avant d'entamer ce parcours de soins, de pleurer de désespoir comme une petite fille parce que je croyais savoir ce qui m'attendait... Je ne savais rien du tout 
Aujourd'hui je suis en plein dedans, je le vis au quotidien et j'étais loin d'imaginer toute cette souffrance qui allait me tomber dessus !
Alors s'il vous plaît...
Arrêtez de me dire d'être courageuse ... Je le suis !
Arrêtez de me dire que je vais m'en sortir... Encore heureux !
Arrêtez de me dire de m'accrocher... Je ne fais que ça !
Arrêtez de me dire que le cancer du sein c'est un des plus faciles à guérir... Bordel ça aussi je le sais !
Arrêtez de me dire que ma petite Yaelle a besoin de moi... J'en suis bien consciente et tous les jours, malgré la fatigue, les douleurs, le moral qui baisse je me lève pour m'occuper d'elle, pour l’emmener à l'école, la récupérer, lui faire à manger etc...
Arrêtez de me dire que je ne suis pas seule... Je le suis au quotidien !
Voilà c'est mon coup de gueule, parce que je suis à bout, parce que je suis épuisée, parce que mon corps n'en peux plus de recevoir ce poison, parce que je ne me reconnais plus, parce que tout les matins je me lève et je vois ma tête chauve dans le miroir, parce que je n'ai même plus la force de cacher la misère et de me faire belle, parce que j'en ai plus qu'assez de ne rien pouvoir faire toute seule...
Je ne vous en veux pas 
Merci pour votre soutien.
J'en ai simplement marre de devoir me battre au quotidien contre cette saloperie de crabe !!! "


Je me retrouve oh combien dans son texte. Alors je le partage avec vous, avec son accord.
   
Je suis rentrée de deux semaines qui devaient être des vacances au bout de 4 jours déjà à trop bouger et à ne pas savoir résister aux tentations (glace, un verre de vin) ... boum.

Je suis partie en mauvais état et revenue pas mieux si même pas pire ... la douleur physique post hépatectomie liée au Crohn m'envahit comme jamais : j'ai augmenté la morphine et le rivotril avec un succès moyen mais je préfère ne pas jouer petit chimiste toute seule.

Et demain j'ai mon Rémicade en chimio ... j'aurai donc plusieurs jours de coucouche panier devant moi
:((  ... mais aussi un effet bénéfique sur les ulcérations du Crohn, dont celles de l'angle hépatique (l foie est attaché à ce dolicolon et aux autres organes internes - diaphragme, estomac, intestin - par des adhérences qui reviennent malgré deux tentatives pour les "nettoyer" : 4h de boulot ! - et donc quand l'intestin d'un Crohnien est spasmique et ulcéré ça fait déjà extrêmement mal avec des coliques à hurler, là le foie bouge avec et c'est l'organe le plus innervé du corps : je vous laisse imaginer)

J'espère néanmoins trouver un minimum d'énergie pour écrire et peindre, au moins.
Et voir des amis.

Et pleurer un peu moins.
Et savourer les petits bonheurs de la vie.

mercredi 9 avril 2014

Un an que mon père est mort ... et je suis en paix avec son départ.

Merci à ceux qui m'ont aidée, à ceux qui m'ont supportée dans tous les sens du terme, pendant cette année difficile qui aura vu se succéder dans ma vie une cascade d'événements douloureux et traumatisant : mon père adoré qui meurt, le diagnostic de Crohn confirmé, la rupture avec le départ de mon amoureux après 3ans et demi, le remaniement familial et le deuil de chacun à son rythme et selon sa personnalité (eux en Suisse, moi à Bruxelles), la mort de mon amie Patricia décédée d'un mélanome laissant un mari et 2 très jeunes garçons sans elle, le décès de mon boss (chef de la zone de police locale Schaerbeek/Evere/St Josse), les Rémicades en chimios, la multiplicité des traitements et des effets secondaires, la mort de mon chat de Suisse, l'analyse commencée qui demande de se remettre en question et des efforts, les 3 pneumonies dont 2 avec hospitalisation et 1 avec coma, des moments de profond désespoir et de souffrance atroce, la mise à la pension anticipée pour inaptitude par mon employeur et ses conséquences, l'envie parfois après 8 ans de spirale et même de cascades d'événements, de blessures et de profonde solitude d'éteindre le poste, et récemment la disparition inquiétante d'un copain, Y. ... (j'en oublie certainement et peu importe).

Heureusement aussi de beaux moments et de belles rencontres, des amis fidèles et présents chacun à leur manière, l'ami bienveillant de mon père qui nous soutient de différentes façons, la famille au sens large, bien présente, des petites étincelles sur mon chemin, retrouver le goût et le plaisir de peindre, encore timidement, mon chat qui m'a réchauffée la nuit dans mon lit esseulée et pleurant ou qui venait faire les siestes indispensables contre moi, présent aussi lors de ces horribles crises de Crohn, des amis me conduisant à l'hôpital et me ramenant, faisant mes courses aussi, mon Ph, ex compagnon de 22 ans présent presque tous les week ends, ... (j'en oublie surement, désolée).

Ce mardi soir, 8 avril, nous irons fêter mon père comme il l'aurait voulu, en famille et entre amis, dans un restaurant gastronomique avec du très bon vin et des rires, avec joie pour tout ce qu'il nous a transmis et donné, avec une pointe de larme pour son absence physique mais le coeur plein d'amour pour lui.

Il est en moi, à côté de moi.

Mon père était un être exceptionnel : il a rompu la chaine de violence et d'incestes des générations précédentes jusqu'à son père et sa mère.
Il voyait en chaque être humain, au delà des épines, la rose fleurie ou le bouton qui ne demandait qu'à éclore.
Il aimait les gens.

Et je suis fière d'être sa fille - même si j'ai aussi reçu ses foutus gènes de merde ainsi que certains de ses défauts ;) .


Réveillée au milieu de la nuit par la douleur, je descends prendre un peu de potion magique et au passage je voulais mettre des photos : pas possible ??? pas d'incarnation physique, pas de photo  ... ?


Alors un tableau : à faire à mon réveil !