mercredi 2 octobre 2013

Billet de la Nuit ...

Il est 5h, Bxl ne se réveille pas encore ...
Hier j'ai oublié de prendre ma morphine retard au coucher : réveillée à 3h40.
D'abord changer de position, caresser le chat qui se love - où ? sur mon ventre bien sur, en plein la cicatrice. Le bouger (pas facile quand un chat de 8kgs veut rester collé à soi !).
Re-bouger, trempée, aller sur sur l'autre côté du lit.
Sentir toutes ses articulations, la douleur monter dans les doigts, les mains, les pieds, les talons, les chevilles, les hanches, non un body scan (une des techniques de méditations qui en général ... endort !) n'est pas une bonne idée dans ce cas, je sens trop.
Penser.
A trop penser, pleurer.
Penser ... papa tu ferais quoi : tu te lèverais, tourner en rond dans ton lit tu l'as assez fait.
Bon je vais quand même essayer de me rendormir.
Penser.
La journée "Emergence" (Ilios Kotsou) a eu lieu à l'ULB avec Christophe André et les autres spécialistes de la psychologie positive et de la méditation (pleine conscience) ... Patricia, j'espère qu'ils t'ont rendu hommage, qu'ils ont pensé à toi qui a permis que la 1ère journée de rencontres et de réflexions puisse exister dans la reconnaissance et la légitimité de cette université. Patricia tu me manques.
Penser.
C'était justement M. qui présentait ... pourquoi ai je du mal ... non, comment faire pour me décrocher de cette relation amoureuse qui m'a tant apportée et tant fait souffrir aussi - je ne comprends toujours pas comment cette histoire s'est terminée en queue de poison, c'est dur pour moi de n'avoir aucune explication, aucune prise (alors que j' accepte mieux les "choses" quand je peux comprendre) ... Ça fait peut être partie du schmilblik : accepter que ce soit ainsi. Mais comment peut on avoir partagé une telle intimité avec l'autre et se retrouvé si déniée, si détestée, si éloignée ? L'apprentissage de la rupture ... une nouvelle expérience, qui prend du temps pour être intégrée !
Penser.
Demain, non bientôt, je verrai un des médecins coordinateur de mon dossier, la rhumatologue (qui m'aime bien, elle l'a dit ce qui est assez sympathique)  ... et qu'aurais je de neuf ? Je m'attends à tout et à rien, comme l'autre fois ... je sais que les neutrophiles sont légèrement remontés, je sais aussi que depuis 5 semaines je fais toujours de la température dès que je "bouge" - l'autre jour quelques courses, ou encore monter les escaliers et faire les poubelles, et hop me sens pas bien, 38°.
Qu'est ce qu'elle va me dire ? Encore des examens ? 
Je ne peux pas, je ne veux pas continuer comme ça dans cet état de larve. L'hématologue qui veut m'enlever la bio/chimiothérapie, moi je veux la continuer, le gastro-entérologue qui craint  que je ne fasse une récidive de tuberculose et qui est inquiet et qui veut encore des examens (invasifs) pour trouver si c'est ça ou pas ... La pneumologue qui cherche.
Et moi qui ne sais plus si j'ai envie de partir en vacances : si c'est pour être mal comme ça, est ce que ça en vaut la peine ? Bouger 1/2h ou 1h calmos puis se reposer (ça peut être s'asseoir tranquillement) sinon ça dégénère, en tous cas si je bouge je dois ou me reposer souvent par à coups ou dormir, comme hier dans la voiture avec ma charmante chauffeuse,D., qui m'a fait faire un tour pour que je puisse trouver une robe, merci D. !
Penser. Et donc ce midi, verdict. Pourrais je partir quand même en vacances ou toujours pas car trop risqué ...
Penser.
Le psy et l'infirmière "douleur" (du Centre de la douleur de l'hôpital) se demandent comment je tiens le coup ?
Je leur ai dit, je tiens. 
Je suis très fragile, et très forte. Je suis un paradoxe.
Ils me disent "vous êtes une battante" ... 
A ma naissance j'ai du me battre pour survivre, aidée par ma mère qui ne dormait plus (prématurée en pleine brousse sans rien comme matériel autre que ses seins).
Pour une nouvelle naissance, peut être que je dois me battre ?
Et là tu es avec moi, papa. Et je sais qu'il y a la sortie, au bout. C'est juste que ça prend du temps, vu les dégâts internes, pour remonter le niveau - pas d'huile - de vie.
Plus penser. 
Je me lève. 
J'écris.
La morphine a arrondi la douleur, elle s'est finalement enfuie ...
Mon chocolat chaud en poudre hotcemel (le seul que je digère) est fini.
Bientôt 6h. Bxl se réveille.
Je vais remonter finir ma nuit un peu éclatée.
Pas encore un jour sans larmes, mais elles ressemblent plus à des larmes de soupapes, de cette solitude que tout malade connaît, et de fatigue évidemment, elles sont quand même moins viscérales, déchirantes et hurlantes qu'il y a 5 mois.
Ce qui n'empêche pas aussi le rire et les petits plaisirs.
Et j'aime la Vie, malgré tout.






Coucher de soleil chez mes parents en Suisse, avec les Alpes an arrière plan




Patricia, une des étoiles dans mon ciel (tu me manques)




La fameuse cicatrice de l'Hépatectomie majeure droite, face avant

 

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